Conférence d’Elyamine SETTOUL : « Penser la radicalisation djihadiste »
Le 1er mars, le collectif « Ensemble on fait quoi ? » a eu l’honneur de recevoir, aux IRTS d’Arras et de Loos, Elyamine SETTOUL, maître de conférences en science politique au sein de la chaire de criminologie du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), où il dirige le certificat de spécialisation Prévention de la radicalisation.
Expert des phénomènes de radicalisation auprès de nombreuses structures, ses recherches s’articulent autour des questions de sécurité/défense et des thèmes liés à l’immigration.
Son dernier livre, Penser la radicalisation djihadiste. Acteurs, théories, mutation 1, qu’Elyamine SETTOUL est venu présenter lors de cette conférence, est le fruit d’un travail d’enquête de 4 années, mené dans une douzaine de prisons et durant lequel il a interviewé 50 détenus condamnés pour radicalisation djihadiste.
Quelques chiffres sur les prisons en France aujourd’hui :
- 250 revenants de Syrie
- 500 TIS (Terroristes ISlamistes : velléitaires, membres d’Al-Qaïda, anciens du Groupe islamique armé)
- 1000 DCSR (Détenus de droit commun susceptibles de radicalisation)
Le concept de radicalisation

L’utilisation du terme « radicalisation » émerge à partir des années 2004-2005, à la suite de 2 événements qui marquent un tournant dans l’histoire du terrorisme islamiste en Occident : les attentats de Madrid en 2004 et ceux de Londres en 2005. Un changement sociologique s’opère alors dans les profils des auteurs de ces attentats, commis par des jeunes nés et socialisés en Occident (tandis que les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis avaient été commis par des acteurs étrangers, essentiellement Saoudiens, Soudanais et Yéménites).
Depuis cette période, le phénomène s’est confirmé : 90% des attaques terroristes sont commises par des autochtones.
Les chercheurs se posent alors de plus en plus la question, non plus du « comment », mais du « pourquoi » du terrorisme : comment des personnes nées et socialisées en Occident, qui souvent ne parlent qu’une seule langue occidentale, en arrivent à poser des bombes contre la société qui les a fait grandir ? Ils tentent d’identifier des séquences biographiques, des récurrences dans les parcours de ces jeunes terroristes.
Etymologie du terme radicalisation :
Radical vient du latin radix, qui signifie « revenir aux racines ». En interviewant les jeunes en prison, Elyamine SETTOUL s’est rendu compte qu’il y a chez eux une problématique liée aux racines, qu’elles soient familiales, migratoires ou post-coloniales, comme quelque chose de l’ordre de l’histoire qui refait surface.
Ce terme de radicalisation, banalisé dans le champ médiatique, est pourtant très controversé dans le champ académique. Les chercheurs émettent 3 critiques de ce concept :
- Il est très difficile de définir ce qu’est une idée radicale, car les valeurs d’une société sont évolutives (ex : l’anti-esclavagisme, l’égalité hommes-femmes, le mariage pour tous… : considérés autrefois comme des idées radicales en Occident, et certaines le sont encore aujourd’hui dans d’autres régions du monde).
- Deux définitions différentes : l’une axée sur le cognitif (est radicalisé celui qui tient des propos radicaux), l’autre axée sur le comportement (n’est radicalisé que celui qui a un comportement violent). Cela change d’un pays à l’autre et dans le temps, par exemple au Canada, le fait de tenir des propos radicaux peut suffire à être fiché, ce qui n’était pas le cas en Angleterre jusqu’en 2005.
- Certains Etats autoritaires instrumentalisent stratégiquement ce concept de radicalisation pour garder le pouvoir : toute opposition politique est considérée comme radicale (ce qui d’ailleurs peut pousser un groupe d’opposition, à l’origine non radical, à se radicaliser, à force d’être marginalisé et de stigmatisé).
Sortir d’une approche djihado-centrée de la radicalisation :
Si ce terme « radicalisation » émerge en 2004-2005, et si l’immense majorité des travaux de recherche portent sur l’islam et le djihad, cela ne veut pas dire qu’il n’existait pas, avant cette période, d’autres formes d’engagement radical. Mais on parlait alors d' »engagement violent », d' »engagement à haute intensité » ou encore d' »engagement radical ».
Ces phénomènes de radicalisation se retrouvent dans la plupart des processus, système politiques et idéologies, qu’ils soient anciens ou contemporains.
Quelques exemples : l’ultra droite, très surveillée par l’appareil sécuritaire en Allemagne, en Norvège, en Suède et en Finlande. L’ultra gauche, très active et violente dans les années 1970-1980 (Bande à Bader en Allemagne, Action Directe en France, les Brigades Rouges en Italie, l’Armée Rouge au Japon). Des militants de mouvements Pro-Life aux Etats-Unis, qui, jusqu’au début des années 2000, allaient jusqu’à tuer des médecins pratiquant l’avortement, au nom de valeurs chrétiennes, fondamentalistes et intégristes. Certaines mouvances sionistes radicales en Israël, partisanes d’une colonisation totale des territoires palestiniens, au nom de références religieuses. Des militants du parti BjP (Bharatiya Janata Party) en Inde, qui tabassent et tuent régulièrement des Indiens chrétiens et musulmans, au nom d’une identité indienne exclusivement hindoue. Le massacre en Birmanie de 5700 Rohingyas en 2017 par des bouddhistes extrémistes. En France, on peut aussi évoquer les violences commises par les séparatistes corses et basques…
Au-delà de cette diversité idéologique, on observe des phénomènes communs, pour lesquels Elyamine SETTOUL emploie la métaphore de l’escalier :
« Le radicalisé est quelqu’un qui monte les marches d’un escalier, les unes après les autres. Chaque marche peut paraître anodine, mais chaque marche va rendre le retour en arrière plus compliqué »
Les facteurs de radicalisation et d’extrémisme :
- Macro-facteurs : à l’échelle d’une société. Quand un groupe est exclu politiquement et économiquement d’une société, parce qu’il est différent (ethniquement, religieusement, sexuellement…), le sentiment d’humiliation peut mener à la radicalisation.
- Meso-facteurs : à l’échelle de l’environnement social, familial, résidentiel. D’après Elyamine SETTOUL, il s’agit du facteur le plus puissant. Beaucoup de jeunes basculent dans la violence suite à une évolution dans un groupe qui contribue à les radicaliser.
- Micro-facteurs : à l’échelle individuelle, psychologique. Il s’agit de la personnalité, des expériences de vie (chocs, traumatismes…).
Ces 3 niveaux de facteurs expliquent la grande diversité des profils des personnes radicalisées. Les spécialistes préfèrent d’ailleurs parler non pas de profils mais de parcours de radicalisation.
La radicalisation : un processus graduel
- Un sentiment d’insatisfaction, un malaise, lié à à une sensation d’être considéré différemment, maltraité, ou lié à une crise (décès, accident, perte d’emploi…).
- La quête de réponses à ses questionnement, qui favorise l’ouverture cognitive : l’esprit devient réceptif à un système explicatif autre.
- La rencontre avec une offre idéologique, qui va réconforter et apaiser l’individu en lui donnant une explication simple à ses questionnements, qui supprime toute culpabilité, en désignant un ennemi monolithique : « si tu souffres dans ta vie, c’est à cause de… ». Côté ultra droite, la cause sera les immigrés, les juifs, les musulmans…, côté ultra gauche : l’Etat et ses lois liberticides, les grands patrons, les forces de l’ordre…, côté djihadistes : les mécréants, les Occidentaux…
- La déshumanisation : dénier son humanité au groupe identifié comme responsable de mes malheurs.
- Le passage à la violence. Ce stade est rarement atteint, l’immense majorité des personnes radicalisées s’arrêtent à l’étape antérieure et restent dans une radicalisation cognitive.

La diversité des trajectoires : des profils aux parcours. Analyse des motivations.
Qu’est-ce qui motive des milliers de personnes en France à rejoindre les contrées syro-irakiennes ?
Elyamine SETTOUL explique qu’il s’agit d’un phénomène « glocal », c’est-à-dire global, mais qui renvoie à des spécificités locales très fortes.
L’Etat islamique, c’est 35 à 40 000 combattants, venus d’une centaine de pays, ce qui en fait l’entité djihadiste la plus cosmopolite de l’histoire. Parmi eux, 5 000 Européens, dont 2 000 Français, ce qui fait de la France le 1er pays occidental « fournisseur » de combattants, en volume global, et le 5ème à l’échelle mondiale, derrière la Tunisie, la Tchétchénie, la Jordanie et le Maroc.
Des variations sociologiques très importantes s’observent d’un pays à l’autre et, à l’échelle infranationale, d’une ville à l’autre : « Il faut toujours comprendre le local pour décrypter le global ». Les motivations diffèrent selon les pays, et, à l’échelle nationale, les réalités de territoire ne sont pas les mêmes d’une région ou d’une ville à l’autre. En France, par exemple, des villes comme Nice, Trappes, Lunel ou Toulouse ont été des grandes pourvoyeuses de combattants, en raison de la présence de recruteurs physiques, qui ont fait un travail auprès de la jeunesse (ex : Omar Diaby, Olivier Corel, les frères Clain). En Belgique, c’est la région entre Verviers et Bruxelles, où opérait l’association Sharia4Belgium.
Les motivations :
1. Faire le Djihad
Le terme est traduit de façon erronée par « guerre sainte ». Dans la langue arabe, les actes humains sont rarement sanctifiés, une guerre ne pas pas être une activité sainte. Dans le Coran, le mot djihad apparaît à 35 reprises et signifie un « effort vers une visée noble ». Le Coran distingue le djihad majeur, qui est un effort sur soi pour lutter contre ses faiblesses, ses passions et ses vices, et le djihad mineur, qui est une lutte vers l’extérieur (cela peut prendre la forme d’un conflit armé ou d’un dur labeur).
Les terroristes ont une définition limitée du djihad, qui la lutte contre les ennemis de l’islam, dont les musulmans considérés comme mauvais pratiquants (ex : les Chiites). D’ailleurs, les premières victimes du terrorisme djihadiste à travers le monde sont de confession musulmane, car beaucoup d’attentats ont lieu dans des pays musulmans.
2. Faire la Hijra
Cela fait référence à un épisode de la vie du prophète Mahomet, parti en exil de La Mecque vers Médine. Dans l’idéologie de Daech, la hijra n’est plus une option mais une obligation, et si possible la hijra vers le Cham, région aussi appelée Grande Syrie, qui correspond aux actuels Liban, Syrie, Irak. Le prophète aurait dit : « Partir faire sa hijra, c’est s’ouvrir les portes du paradis ». Beaucoup de jeunes Français sont partis avec cette idée-là, et souvent ce sont des départs en famille.
Djihad + Hijra = Califat (empire musulman des origines). Cela fait référence à ce qui est considéré comme un âge d’or, un âge de puissance. Et les frontières de ce Califat rêvé sont floues : pour certains il va de l’Irak au Maroc, pour d’autres de l’Andalousie aux provinces orientales de Chine, pour d’autres encore c’est le monde entier. Le projet serait aussi de mettre fin aux frontières du monde arabo-musulman dessinées arbitrairement par les puissances coloniales françaises et britanniques.
3. Fascination pour la mort
Cette génération de djihadistes entretient une appétence particulière pour le gore et pour la mort.Certains chercheurs considèrent que ça n’est pas propre à l’espace arabo-musulman, mais que c’est un phénomène générationnel. Elyamine SETTOURL évoque par exemple les cartels mexicains actuels, hyper violents, qui mettent en scène la mort de leurs victimes.
La mort est aussi recherchée par les djihadistes, avec une volonté de mourir en martyre.
Et si possible une mort hyper médiatique, avec cette fascination de ces jeunes pour les réseaux sociaux : mourir de façon spectaculaire, en se filmant. On a là une dimension très narcissique. Ce phénomène s’observe aussi dans le terrorisme d’extrême droite.
4. Quête de rédemption
Daech dit à ces jeunes que, quelques soient les fautes commises, s’ils viennent faire le djihad, Dieu leur pardonnera et leur donnera directement l’accès au paradis. On retrouve beaucoup de jeunes passés par la case délinquance, transgression, prison.
Selon Elyamine SETTOUL, « la prison est un espace de sacralisation de la haine : le jeune y entre avec une haine « profane » de la société, perçue comme raciste, islamophobe, anti-immigrés, anti-banlieues, il y rencontre un islamiste prosélyte qui va le travailler jusqu’à en faire un combattant, et il en ressort avec une haine religieuse ».
Cette question de la présence de délinquants au sein de l’Etat islamiste est ambivalente : entre quête de rédemption et volonté de satisfaire des pulsions meurtrières, sexuelles ou lucratives.
5. Militantisme politique
Cela concerne des jeunes intellectuellement construits, capables de développer un discours critique à l’égard des politiques menées par les pays occidentaux. Ils sont minoritaires, mais ils existent.
6. Quête d’aventure et escapisme
Ce sont des jeunes qui estiment mener une vie morne, ils sont en échec scolaire et professionnel, ont une famille dysfonctionnelle… L’engagement djihadiste leur permet de sortir de la mésestime de soi, de passer du statut de « loser » à celui de l' »aristocratie des croyants ». C’est puissant d’un point de vue narcissique.
7. Motivation humanitaire
Cet argument pouvait être valable pour les jeunes partis en 2011-2012, pendant les Printemps arabes et leur répression. Certains jeunes, une minorité, ont été émus par cela, sont partis, puis sont revenus, ils sont aujourd’hui invisibles des radars des services de renseignement. A partir de 2013-2014, le projet de l’Etat islamiste s’étant affirmé, cet argument n’est plus crédible.
8. Le jihad féminin
Il présente 2 types de profils :
- La jeune fille naïve, qui part se marier avec un combattant virile, sans connaître grand-chose des enjeux locaux.
- La jeune fille qui estime ne plus pouvoir vivre son islamité en Occident, qui a un discours très critique sur la sexualisation de la femme, qui veut trouver dans l’Etat islamique une possibilité de s’épanouir.
Les caractéristiques sociologiques transversales
- Un phénomène générationnel : 80% des djihadistes avaient entre 18 et 26 ans au moment de leur départ. Car c’est un âge d’incertitude identitaire, on se cherche et on cherche des idéaux d’adultes.
- Des failles protéiformes : affectives, identitaires.
- Une disponibilité biographique : entre 18 et 26 ans, c’est l’âge de la liberté. Les études sociologiques sur le militantisme radical montrent qu’à partir de 28-30 ans, il y a un effondrement de l’engagement radical (car, souvent : mariage, enfants, plus le temps de s’investir dans des activités aussi chronophages) .
- Un rapport au père souvent dégradé : père absent, parti, décédé ou méprisé (car vu comme trop « docile », sans grade).
- Des parcours de transgression, de délinquance, de marginalisation.

La dimension théorique de l’engagement djihadiste
Le débat français s’est articulé autour d’une dualité théorique entre radicalisation de l’islam et islamisation de la radicalité. Mais, pour Elyamine SETTOUL, le phénomène est beaucoup plus disparate cela.
5 processus de djihadisation :
1. La dévotion
Il s’agit de l’école théorique portée par Gilles KEPEL, Bernard ROUGIER, Hugo MICHERON, qui considèrent que les djihadistes sont avant tout des religieux salafistes. Un djihadiste serait un salafiste qui va au bout de sa logique, il y aurait un continuum entre le rigorisme religieux et l’engagement djihadiste.
2. L’émotion
C’est l’école de l’islamisation de la radicalité. La religion est secondaire. Pour ces chercheurs, ces jeunes djihadistes n’ont pas baigné dans une socialisation religieuse très intense, ils se caractérisent plus par une radicalité sociale, ils sont attirés par la violence. S’ils étaient nés dans les années 1960, ils auraient choisi Action Directe. « Le djihadisme apparaît aujourd’hui comme la dernière idéologie sur le marché pour contester le système. »
3. La politisation
Ecole portée par François BURGAT, Xavier CRETTIEZ. Le djihadisme serait la conséquence de la violence des pays occidentaux, qui dominent et maltraitent depuis des siècles le Moyen Orient et les pays musulmans. Cette violence politique génère mécaniquement une contre-violence. Cette école considère les djihadistes comme des militants politiques.
4. La manipulation
Cette école, porté par Dounia BOUZAR, considère l’engagement djihadiste comme un phénomène d’emprise mentale et sectaire. Daech utilise des techniques sectaires, via des algorithmes sur Internet pour cibler des jeunes en particulier, en créant une « insularité cognitive ». Et sur le terrain, en sous-alimentant et fatiguant ses combattants, en usant de substances médicamenteuses, en les rendant inaccessibles individuellement à leurs familles.
C’est aussi l’effet de groupe : les recruteurs ont souvent une emprise mentale sur des jeunes très influençables, qui cherchent un groupe d’appartenance.
5. La pulsion
Ecole représentée par Jean-François GAYRAUD et Alain BAUER. Ils insistent sur la dimension criminelle de l’organisation Daech : pillages des musées et des richesses des Syriens et des Irakiens.
Selon Elyamine SETTOUL, chacune de ces approches est intéressante car elle permet d’éclairer la mosaïque djihadiste, néanmoins, chacune a aussi ses limites.
– L’approche de la dévotion permet de comprendre le fonctionnement des leaders, des recruteurs et des doctrinaires. Mais si on regarde les parcours des djihadistes, le salafisme ne transparaît pas de manière forte.
– L’approche de l’émotion permet de comprendre les exécutants, la masse. Mais il est faux de dire que l’islamisme est la dernière idéologie sur le marché (il donne l’exemple de l’extrême gauche, des altermondialistes).
– L’approche de la politisation remet du politique dans un phénomène qu’on a tendance à trop dépolitiser. Il y a effectivement une notion de vengeance politique très présente. Cependant, attention à ne pas sur-politiser : les jeunes partis sur zone ont souvent arrêté l’école très tôt et méconnaissent les enjeux complexes qui structurent le Moyen Orient. De plus, 30% des djihadistes sont des convertis : on ne peut pas dire que ces jeunes-là étaient discriminés.
– L’approche de la manipulation est intéressante pour comprendre comment les organisations attirent et influencent les jeunes, notamment sur Internet. Mais on sait aujourd’hui que la plupart des jeunes partis sur zone n’ont pas été manipulés.
– Enfin, l’approche de la pulsion permet de voir l’imbrication croissante entre djihadisme et criminalité. Mais dire que ces jeunes étaient motivés avant tout par l’aspect lucratif, meurtrier et sexuel, ne tient pas, car aller sur zone représente un taux de mortalité très élevé. La véritable récompense pour eux, c’est le paradis.

Quelles implications pour les stratégies de désengagement ?
La « dédjihadisation » va dépendre des profils et des processus de djihadisation, c’est-à-dire du type de motivation qui a poussé la personne à se radicaliser.
- Dans le cas de la pulsion : on a souvent affaire à des jeunes qui ont des appétences pour les activités transgressives, ils seront donc peut-être plus perméables à la récidive en sortant de prison.
- Dans le cas de la manipulation : il faut éloigner les jeunes des leaders négatifs, des prosélytes qui essaient de les instrumentaliser.
- Dans le cas de la politisation : essayer de travailler à un réengagement dans des formes d’actions politiques plus conventionnelles (ex : associations humanitaires).
- Dans le cas de l’émotion : ce sont des jeunes qui ont une radicalité sociale, avec qui il est nécessaire de travailler la verbalisation des émotions, le narcissisme.
- Dans le cas de la dévotion : il s’agit de la catégorie la plus complexe à accompagner, car ces jeunes justifient leur comportement par une certaine lecture religieuse. C’est avec eux que l’Etat travaille le plus et pour qui il a mobilisé des médiateurs religieux dans les prisons. Ils font un travail de déconstruction qui consiste montrer d’autres lectures religieuses. Pour faire, il faut des médiateurs de haut niveau, qui maîtrisent la langue arabe et les références coraniques. C’est un travail de longue haleine, qui permet une désistance idéologique, c’est-à-dire une renonciation à l’action violente.
L’objectif n’est pas nécessairement d’enlever aux personnes leurs idées radicales, mais de faire en sorte qu’elles renoncent à la violence. Le désengagement est objectivable : beaucoup de groupes à travers le monde se sont désengagés.
Découvrez la vidéo de la conférence :
- PUF 2022[↩]